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Le briagandage d'Embrun

Le brigandage d’Embrun est représenté dans une estampe

 dont voici le détail et l’ordonnance

L’archevêque président est représenté sous un dais dont les aigrettes sont quatre bustes de jésuites avec le bonnet à trois cornes. Son fauteuil est un grand et gros jésuite dont la tête plus haute que celle de l’archevêque et les bras étendus forment les bras du fauteuil, sur l’un desquels le président appuie l’un des siens et tenant l’autre élevé, il montre un jésuite suspendu en l’air au-dessus de l’assemblée avec de grandes ailes de chauve-souris. Six évêques de chaque côté sont également assis sur chacun un jésuite qui souffle dans l’oreille de chaque évêque et d’une main le tient par le nez.

Au milieu de l’assemblée est une crédence soutenue d’un côté par un singe et de l’autre par un Pantalon ; sur cette crédence est placée au milieu des évangiles la Constitution Unigenitus ; le tapis qui rabat par devant est le Formulaire qui se termine par un gros rouleau qui renferme les signatures dont il en paraît quelques-unes au-dessus.

Les députés du deuxième ordre sont assis sur des bancs aux pieds des évêques ; il ont des bonnets à quatre cornes, mais un manteau de jésuite, le collet haut par dessus leur rochet et tiennent leurs bonnets à la main.

Le promoteur du concile est à un petit bureau debout et tourné vers M. de Senez, la main étendue en le menaçant.

Le secrétaire du concile est au même bureau, écrivant sur un papier effabuntur et loquentur iniquitatem, p.93, v.4

Une porte ouverte découvre des soldats armés, leurs drapeaux, tambours. Deux jésuites avec hallebardes et bandouillères gardent cette porte. Vis-à-vis cette porte, de l’autre côté de la salle, paraît M. l’évêque de Senez, en habits pontificaux, à genoux. Vis-à-vis un large prie-Dieu, sur lequel est posé le livre des saints évangiles ; la mitre du prélat est du côté gauche, son bâton pastoral à droite, incliné sur le prie-Dieu. Du côté droit est représenté saint Pierre appuyant ses clefs sur le livre des évangiles et posant l’autre main sur le saint prélat. Du côté gauche est un saint Paul, le glaive en main, protégeant le saint évêque, au-dessus duquel est un Saint-Esprit en forme de colombe. Un fauteuil vide est placé derrière, sur le dossier duquel sont les attributs des quatre  pères de l’Église latine, savoir au haut du cadre un cœur enflammé, saint Augustin, une ruche d’abeilles voltigeantes autour de saint Ambroise, une tiare papale, saint Grégoire. Les deux bras du fauteuil sont terminés par deux têtes à crinière de lion, saint Jérôme dans le cartouche du dossier ce mot Veritas. On lit auprès du Saint-Esprit ces mots d’un hymne de saint Ambroise hunc nemo fallit judicem. Voilà votre juge que personne ne trompe. Depuis les pieds du prie-Dieu, traversant la salle jusqu’à la port ont voit ces mots d’Isaïe, ch.5, v.7 expectavi ut faceret judicium et ecce iniquitas et justitiam et ex clamor. Je me suis attendu qu’ils feraient des actions justes et je ne vois qu’iniquité ; et qu’ils feraient des fruits de justice et je n’entends que les cris de ceux qui sont dans l’oppression.

Le titre de l’estampe est le Brigandage d’Embrun.

Le président dit à l’assemblée des paroles du 2ème chapitre de la Sagesse, v.12. Faisons tomber le juste dans nos pièges parce qu’il nous incommode et qu’il est contraire à notre manière de vivre, qu’il nous reproche le violemment de la foi et qu’il nous déshonore en décriant les fautes de notre conduite.

Les opinants répondent, même ch.V, La seule vue nous en est insupportable. La suite de ce chapitre jusqu’à la fin peut être raisonnablement appliqué au conciliabule et au personnage de M. l’évêque de Senez qui a l’honneur de représenter le souverain pasteur, autant par son caractère que par les traitements qu’il y éprouve pour la défense de la vérité.

Le promoteur dit ces paroles de saint Jean : Nous avons une loi et selon cette loi, il doit mourir. Ces conclusions sanguinaires ne seront point suivies, à cause d’une vieille tradition qui dit que l’Église a le sang en horreur ; mais comme le pilatisme domine dans bien des prélats, par un reste de vergogne, il y a bien de l’apparence que, suivant l’esprit de ce juge romain, le président finira cette assemblée en disant, Luc 23, v.15, je m’en vais donc le renvoyer après l’avoir châtié, et tous les jésuites parleront en criant, grimaçant et maugréant Tolle, tolle, Jean, 19, v.13.

Numéro
£0238


Année
1730




Références

Clairambault, F.Fr.12700, p.329-33 - Maurepas, F.Fr.12632, p.195-98 - F.Fr.12800, p. 299-301 - F.Fr.13660, f°156r-158r - F.Fr.15143, .395-403 - Arsenal 2976, p.27-31 - BHVP, MS369, p.423-31


Notes

Le brigandage d'Embrun est représenté dans une estampe dont voici le détail et l'ordonnance